Fomes fomentarius, ou Amadouvier, est un champignon commun dans l’hémisphère nord, qui pousse sur le bois en causant sa décomposition et pouvant atteindre un diamètre de 50 cm. Utilisé comme allume-feu depuis la préhistoire, il a aussi trouvé de nombreux usages en médecine : cautérisation des plaies, pansement, compresse ; ou encore dans la fabrication de certains vêtements ou objets décoratifs. Dans une étude publiée dans la revue Science Advances, une équipe de chercheurs finlandais, allemands et néerlandais, se propose d’étudier en détail la structure de ce champignon étonnant et d’envisager son utilisation en tant que biomatériau qui pourrait, selon les chercheurs, « surpasser les matériaux naturels ».
Les biomatériaux, une industrie florissante

Depuis quelques années, l’industrie des biomatériaux est florissante. Les mycomatériaux, en particulier, se popularisent puisqu’ils présentent de nombreux avantages : ils sont faits à partir de matière organique, sont biodégradables et leur fabrication nécessite beaucoup moins de dioxyde de carbone (CO2) que pour les matériaux traditionnels. Ils sont aussi plus économiques.
Aujourd’hui, ils présentent une alternative intéressante au cuir et aux matières synthétiques dans l’industrie du textile. Ils peuvent aussi remplacer certains polymères synthétiques et servir à fabriquer des emballages, du mobilier et même être utilisés dans le domaine du bâtiment (construction, isolation, etc.).
Une structure en trois couches, aux propriétés différentes
Le champignon, collecté en Finlande, a été divisé en plusieurs sections individuelles. Sa composition, ses couches et ses propriétés physiques ont été étudiées grâce à des méthodes telles que la cristallographie aux rayons X (technique utilisée pour caractériser la matière) ou encore la microtomographie aux rayons X (permettant de retranscrire une image en 3D d’un échantillon). Ces différentes techniques ont permis aux chercheurs d’identifier et caractériser en détail les trois couches qui constituent son basidiome (la partie visible que l’on appelle communément « champignon ») :
* La croûte, qui est peu poreuse et a une structure dense et relativement uniforme, bien que son épaisseur puisse varier par endroits
* Une couche mousseuse, molle et cuireuse : la chair
* Une couche constituée de structures tubulaires creuses (tubes hyménophores) orientés parallèlement
Quant à ses propriétés mécaniques, chaque couche a été étudiée avec des essais de traction, de compression et de nanoindentation (technique permettant d’obtenir les propriétés élastoplastiques d’un matériau). Les résultats montrent que la couche constituée de tubes hyménophores et la chair ont une résistance comparable au pin, au cuir ou au contreplaqué.
De nombreuses possibilités d’utilisation
L’étude de F. fomentarius a montré que ce dernier possède des propriétés proches de certains matériaux de notre quotidien, tout en présentant des avantages de composition et de poids : « Les basidiomes de F. Fomentarius sont ingénieusement légers, de composition simple, mais performants », précisent les chercheurs.
Un autre avantage de ce champignon est que sa croissance peut être guidée en une structure plus ou moins complexe capable d’adopter les fonctionnalités souhaitées, d’autant que ses couches aux propriétés différentes permettent de multiples applications : « Ce qui est extraordinaire est que, avec des changements minimes dans leur morphologie cellulaire et leur composition polymérique extracellulaire, les champignons forment des matériaux divers avec des performances physicochimiques distinctes qui surpassent la plupart des matériaux humains et naturels (…). »
En effet, les chercheurs soutiennent que leur étude pourrait être utile aux ingénieurs développant des nanocomposites ou des polysaccharides (des matériaux à base d’hydrates de carbone). Le champignon pourrait aussi être utilisé dans le domaine médical pour l’ingénierie tissulaire, ou encore pour fabriquer des implants orthopédiques.

 

Sciences et Avenir

 

 

 

 

 

 

 

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