L’effet protecteur des oméga-3 revu à la baisse !

Pêché sur la toile…

Dans le domaine de la nutrition, comme ailleurs, les « indispensables » d’hier finissent par devenir des substances comme les autres.

Effet de mode ? Résultat d’un marketing très bien organisé ? Optimisme excessif des chercheurs et des nutritionnistes ? Toujours est-il que les sacro-saints oméga-3, ces acides gras parés de multiples vertus depuis des années, pourraient bien finir dans le grand placard des aliments « santé » qui n’ont pas tenu leurs promesses. Une méta-analyse incluant une vingtaine d’études et portant au total sur près de 70 000 patients – publiée mercredi dans le sérieux Journal of the American Medical Association (JAMA) – conclut que la consommation régulière de ces lipides n’a pas les effets bénéfiques attendus sur le risque d’accidents cardio-vasculaires majeurs, ni sur la mortalité toutes causes confondues.

Compléments alimentaires

Pour mémoire, les acides gras oméga-3 sont dits « essentiels » car l’organisme ne peut pas en synthétiser la quantité nécessaire à nos besoins quotidiens. Néanmoins, une alimentation équilibrée, contenant notamment de l’huile de colza, de soja, de noix, des graines de lin, des salades (pourpier, mâche), des épinards, du lapin, de l’oie, du gibier et des poissons gras, peut en apporter une quantité non négligeable. Surtout, médiatisation aidant, les aliments « enrichis en oméga 3 » et les compléments alimentaires contenant cette précieuse substance se sont multipliés au fil des ans.

Ce marché florissant pourrait connaître une décroissance progressive, après la publication d’Evangelos Rizos, de l’hôpital d’Ioannina en Grèce, et de ses collègues. Ayant remarqué que de nombreuses études conduites pour tenter de montrer l’intérêt d’une supplémentation à base de ces acides gras poly-insaturés dérivés de l’huile de poisson avaient donné des résultats contradictoires, ils se sont lancés dans cette méta-analyse en y incluant les études randomisées (comparant des populations globalement proches mais divergentes sur la consommation d’oméga-3 en supplémentation ou dans l’alimentation), soit en prévention primaire (avant un accident), soit en prévention secondaire (après un premier problème).

Traitement adjuvant

Leurs conclusions sont formelles. Malgré des « tendances favorables » concernant le rôle des oméga-3 dans la prévention des décès cardiaques, des morts subites et des infarctus du myocarde, celles-ci n’étaient pas statistiquement significatives. De plus, il n’y avait pas d’effet notable sur le risque d’accident vasculaire cérébral. Les auteurs de ce travail estiment donc que leurs résultats ne justifient pas la recommandation d’emploi des oméga-3 en prévention cardio-vasculaire. À noter qu’il faudra néanmoins attendre d’autres études concernant la prévention du cancer.

Cela ne devrait guère étonner les experts de certains grands pays qui s’étaient déjà penchés sur la question. Aux États-Unis, la Food and Drug Administration (FDA) n’a approuvé la prescription des oméga-3 que pour réduire le taux de triglycérides dans le sang des personnes ayant un niveau trop élevé de ces lipides. Et une autorisation de mise sur le marché n’a été accordée, dans notre pays, que comme traitement adjuvant en prévention secondaire de l’infarctus du myocarde, en association avec les traitements de référence. Inutile donc de se jeter sur les gélules d’oméga-3. Une fois encore, le fait de manger équilibré et de bouger reste la solution numéro un. Et ce message-là ne risque pas d’être un jour démenti…

Par Anne Jeanblanc

Source : www.lepoint.fr