Espagne. Le casse-tête d’un pays sans gouvernement.

Les politiques vont-ils former rapidement un gouvernement en Espagne ? Quelles sont les causes et conséquences de l’incertitude ? Eléments de réponse.

Le dirigeant socialiste Pedro Sanchez a échoué ce mercredi à rassembler une majorité absolue au parlement espagnol pour soutenir le gouvernement de coalition qu’il présentait avec les centristes de Ciudadanos.

Sanchez a obtenu le soutien de 130 des 350 députés de la chambre basse espagnole, loin des 176 requis lors du premier tour de scrutin.

Les politiques vont-ils former rapidement un gouvernement en Espagne?? Quelles sont les causes et conséquences de l’incertitude?? Éléments de réponse, deux mois et demi après les élections.

Le calendrier

L’Espagne a tenu le 20 décembre des législatives, qui ont débouché sur une fragmentation sans précédent du Parlement. Après avoir consulté les chefs de partis, le roi Felipe VI a désigné le 2 février le dirigeant socialiste Pedro Sanchez pour former un gouvernement, le sortant de droite Mariano Rajoy ayant décliné l’offre.

  1. Sanchez est le septième de l’histoire de la jeune démocratie espagnole à tenter l’investiture. Mercredi, il a échoué lors d’un premier tour de vote des députés, obtenant 130 voix seulement, contre 219 et une abstention. Vendredi peu après 19?h?30 (18?h?30 GMT) il se soumettra à un deuxième vote et, sauf coup de théâtre, sera à nouveau recalé.

Les partis disposent ensuite de deux mois, jusqu’au 2 mai, pour tenter de s’accorder sur un candidat à l’investiture, le même ou un autre. S’ils échouent, le président du Congrès (chambre des députés) devra convoquer de nouvelles élections, en principe le 26 juin.

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Les forces en présence 

– Le Parlement est partagé entre quatre grandes forces et des petites formations régionales ou indépendantistes?: le Parti populaire (PP, droite), au pouvoir depuis 2011 (123 députés ou alliés)?; le Parti socialiste (PSOE, 90), le nouveau parti de gauche radicale Podemos et ses alliés (65), le libéral Ciudadanos (40). Les indépendantistes et nationalistes basques et catalans ont un poids certain, qu’ils soient de gauche ou de droite, avec une trentaine d’élus.

– Pedro Sanchez, 44 ans, et ses élus sont parvenus à un accord avec les centristes de Ciudadanos, pour rassembler 130 élus, loin de la majorité absolue nécessaire pour l’investiture au premier tour (176 voix sur 350). Au second tour, il serait investi s’il obtenait davantage de voix pour que de contre. Aussi tente-t-il d’obtenir le soutien de Podemos, plaidant que c’est la seule solution pour chasser la droite du pouvoir. Une abstention de Podemos serait insuffisante, sans le concours en plus d’élus nationalistes ou indépendantistes.

– Mariano Rajoy, 60 ans, soutient qu’il n’y a d’autre planche de salut qu’une « grande coalition » comprenant droite, socialistes et centristes. Elle serait fondée sur la défense de l’unité face aux indépendantismes, contre les « aventures » économiques proposées par Podemos et pour le maintien d’une politique saine en matière de finances publiques pour protéger la croissance (+3,2 % en 2015). Mais il n’a aucun allié, et de multiples affaires de corruption gangrènent son parti. 

La Catalogne, nœud gordien

La situation de la Catalogne complique les alliances. Au-delà d’un clivage gauche-droite, il en existe un autre autour de la défense de l’unité du pays.

Le PSOE pourrait s’allier à la gauche radicale dans bien des domaines mais ils s’opposent sur un point fondamental?: le droit à un référendum d’autodétermination des Catalans, défendu par Podemos, ses alliés, et une vingtaine de députés, soit plus de 80 voix.

Pedro Sanchez, dont un voyage récent à Lisbonne avait montré son intention de privilégier une alliance de gauche, est pieds et poings liés par une partie des barons socialistes qui refusent toute concession en la matière. 

L’avenir

Jeudi, la maire de Madrid, Manuela Carmena, issue d’une plateforme d’indignés mais aux commandes grâce au soutien des socialistes, a appelé Podemos à soutenir Pedro Sanchez, en rejetant la perspective de nouvelles élections.

Le Parti populaire et Podemos ont déjà annoncé être disposés à continuer à « parler » avec les socialistes jusqu’en mai.

De nouvelles élections, mais avec qui??

En cas de nouveau scrutin se posera la question des chefs de file de partis. Les sondages semblent indiquer qu’en l’absence de changements, les intentions de vote n’ont pas beaucoup bougé.

Mariano Rajoy doit-il céder la place à sa vice-présidente Soraya Saenz de Santamaria, pour démontrer la volonté de rénovation du parti?? Certains élus au sein du PP souhaitent qu’il s’écarte, mais rien de l’y oblige.

La même question se pose pour Pedro Sanchez, contesté en interne après un résultat médiocre, le pire de l’histoire du Parti socialiste.

Espagne : pourquoi Rajoy renonce et pourquoi le socialiste Sá?nchez ne peut faire mieux : l’impossible formation du gouvernement espagnol.

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Source :  www.ouest-france.fr